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Thème de la conférence : Femmes autochtones et ressources naturelles
Cas de la République Démocratique du Congo
The Pride Inn, Hotel, Raphta Road, Westlands, Nairobi- Kenya
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Chers participants à la conférence(A vos titres et qualités respectifs);
Distingués invités, Mesdames et Messieurs;
Je m'appelle Véronique BULAYA, Coordinatrice de l'organisation d'accompagnement des femmes et jeunes autochtones dénommée PIFEVA(Pilier aux Femmes aux Vulnérables Actives en République Démocratique du Congo) basée à Bukavu en RDC.
Je suis très honorée de participer à cette conférence grâce à l'ingéniosité de SAMBURU WOMEN TRUST qui me permet d'amplifier la voix des femmes autochtones de la République Démocratique du Congo tout au long de cette conférence ayant comme thème " Femmes autochtones et ressources naturelles".
Que SAMBURU WOMEN TRUST trouve ici, en sa qualité d'organisation hôtede cette conférence,l'expression de notre profonde gratitude.
Qu'il plaise aussi à toute l'équipe d'organisation de cette conférence de recevoir également ici nos sincères félicitations pour les sacrifices consentis pour la réussite de cette conférence d'importance capitale pour les femmes autochtones Africaines.
Chers participants à la conférence(A vos titres et qualités respectifs);
Distingués invités, Mesdames et Messieurs;
La situation des femmes autochtones de la RDC demeure très inquiétante et tout particulièrement celle des femmes autochtones qui ont subi, et qui continuent de subir, de multiples formes de discrimination et de graves violations de leurs droits humains notamment leur droit d'accès à la terre et aux ressources naturelles.
Il est déplorable que le rapport du gouvernement de la RDC sur l'application de la déclaration de Beijing ne fasse aucunement mention des femmes autochtones de la RDC alors qu’elles représentent l’un des groupes sociaux les plus marginalisés du pays. Nous profitons de cette occasion pour dénoncer le fait que les femmes autochtones et leurs organisations n'ont pas été associées à l'examen en mai 2019 au niveau national(RDC) des engagements pris par la RDC dans le cadre de l'application de la déclaration de Beijing.
En effet, l’insécurité foncière continue d'accentuer la marginalisation des femmes autochtones en République Démocratique du Congo. Cette problématique s'explique du fait que le droit des femmes autochtones à la terre et aux ressources naturelles est intimement lié au droit des peuples autochtones à leurs terres ancestrales. Cela se justifie du fait que la relation profonde qu’entretiennent les femmes autochtones en particulier, et l'ensemble des peuples autochtones de la RDC avec leurs terres, territoires et ressources naturelles qu’ils regorgent est bien reconnue par le droit international. Cette relation à la fois spirituelle, culturelle, sociale, économique et politique est indispensable à leur existence, leur survie et à leur identification même en tant que peuples autochtones.
De nombreux instruments juridiques protègent sans équivoque les droits fonciers des femmes et peuples autochtones, dont la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones qui reconnaît le droit des peuples autochtones de posséder, d’utiliser, de mettre en valeur et de contrôler les terres qu’ils possèdent parce qu’ils leur appartiennent ou qu’ils les occupent ou les utilisent traditionnellement, ainsi que ceux qu’ils ont acquis.
Le Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels des nations unies a maintes fois reconnu le lien fondamental qui entre la protection des droits des peuples autochtones de posséder, de mettre en valeur, de contrôler et d’utiliser leurs terres, leurs ressources et leurs territoires communaux et la préservation de leur mode de vie, leurs moyens de subsistance et essentiellement, leur identité culturelle.
Malheureusement, tenant compte des relations et rôles qu’entretiennent les femmes autochtones envers leurs terres ancestrales, la dépossession de leurs terres et territoires ancestraux à laquelle elles ont été et continuent d’être confrontés a nécessairement entrainé des impacts différents pour les hommes et les femmes autochtones.
Pour les femmes autochtones, leurs rôles centraux dans la cueillette des aliments et des plantes médicinales pour nourrir et soigner leur famille, dans l’aménagement de leurs cabanes, dans la production d’items pour leur ménage tels que des paniers, dans la pêche, la chasse et dans la vente des produits forestiers non lignés et leur rôle clé dans la préservation de leurs vastes connaissances des écosystèmes qui les entourent et dans la transmission du savoir traditionnel et celui lié aux technologies indigènes se sont vus grandement compromis. Bien qu’il demeure leur responsabilité d’assurer le bien-être de leurs familles, elles sont souvent dépourvues de moyens pour le faire et doivent ainsi vivre dans des conditions d’extrême vulnérabilité. Ceci les expose à l’exploitation, la mendicité, la prostitution et la violence.
Malgré l’adoption du Code forestier et un moratoire sur les concessions, le commerce illégal de bois, l’exploitation abusive des forêts de la RDC continuent d’être préjudiciables à l’écologie et à la biodiversité et de porter atteinte aux droits des femmes autochtones, en particulier celui d’occuper leurs terres ancestrales et de gérer leurs forêts selon leurs pratiques traditionnelles.
La mise en place de parcs nationaux et de réserves naturelles a également contribué à la dépossession des femmes et peuples autochtones de la RDC. C’est le cas de milliers d’autochtones qui ont brutalement été expulsés de leurs terres ancestrales lors de la création de parcs nationaux ou l’élargissement de leurs limites au Sud Kivu (Parc National de Kahuzi-Biega) et la (Réserve Naturelle d'Itombwe), au Nord Kivu (Parc National de Virunga), en province Orientale (Réserve faunique à Okapi) et en Équateur (Parc national de Salonga) sans consultation ni indemnisation.
Nous rappelons ici que ces derniers auraient dû recevoir d’autres terres en guise de compensation, mais rien n’a été fait. Maintenant, il leur est interdit de chasser dans le parc et de cueillir les produits du parc. Ils sont privés de ressources alimentaires et de plantes médicinales et ils n’ont plus accès à leur lieu de culte.
Les terres des femmes et peuples autochtones ont été aussi spoliées pour la mise en place de projets d’industries extractives et ce, souvent en violation du droit national en matière de consultations et du droit international relativement au droit des peuples autochtones au consentement libre, préalable et éclairé . Par exemple, des concessions ont été installées sur et à coté des terres ancestrales de peuples autochtones sans leur consultation ou consentement préalable, telles que la concession de la BBC et de l’Industrie de Transformation du Bois (ITB) dans les territoires d’Ingende et de Bikoro dans la province de l’Équateur. Les exploitants de ces concessions opèrent sans tenir compte des droits des peuples autochtones sur ces concessions et sans que ces derniers ne bénéficient de quelconque avantage.
Eu égard à ce qui précède, et en marge de cette conférence, PIFEVA a organisé des consultations participatives locales avec les femmes autochtones qu'elles accompagne directement sur terrain et recommande ce qui suit:
1) PIFEVA et les femmes autochtones accompagnées en RDC demande le soutien des partenaires et donateurs pour amplifier la voix des femmes autochtones de la RDC à la conférence de Beijing +25 prévue en septembre 2020 à New York;
2) Le gouvernement de la RDC devrait mettre en place un mécanisme visant à fournir une réparation aux femmes et jeunes autochtones, de même qu’aux peuples autochtones en tant que collectivité, pour leurs terres qui ont été prises sans leur consentement, et s’assurer que la compensation octroyée soit juste et équitable et ne contribue pas à exacerber les inégalités de genre;
3) Le gouvernement de la RDC devrait s’assurer que les réformes foncières et forestières en cours ainsi que les initiatives internationales envers lesquelles il s’est engagé, portent une attention particulière aux femmes autochtones et qu’elles leur garantissent le droit d’accéder et de contrôler leurs terres et ressources naturelles. Cette protection inclut la reconnaissance du droit collectif des peuples autochtones de maintenir leurs liens culturels avec leurs terres et de posséder et de contrôler leurs ressources naturelles;
4) Le gouvernement de la RDC devrait adopter des mesures législatives spécifiques qui reconnaissent les droits fonciers des femmes et peuples autochtones en général ainsi que leur droit au consentement libre, préalable et éclairé. Le processus de zonage des forêts congolaises en cours devrait prévoir un mécanisme visant à identifier les terres et territoires des femmes et peuples autochtones dans le but de les reconnaître et les protéger, conformément aux conventions internationales que la RDC a ratifiées.
5) Le gouvernement de la RDC devrait sans délai adopter et mettre en œuvre des mesures spéciales visant à assurer l’intégration socio-économique des femmes et jeunes autochtones en RDC, notamment par la protection et la mise en œuvre de leurs droits économiques, sociaux et culturels.